En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies pour vous proposer des contenus et services adaptés à vos centres d'intérêts. En savoir plus et gérer ces paramètres. OK X
 
 

 

 

Techniques

Pourquoi la sensibilité aux rayonnements spatiaux est un paramètre important

Par Adrian Helwig, Javier Valle, EMEA S&A, Space Power, Freising, Dallas

Publication: Octobre 2021

Partagez sur
 
Concevoir des systèmes de gestion de l’alimentation des satellites se révèle de plus en plus complexe en raison du nombre croissant de réseaux prédiffusés programmables (FPGA) qualifiés pour l’aérospatiale disponibles sur le marché, ainsi que du renforcement des capacités de traitement associées...
 

Ce dernier point tient aux multiples rails requis par le circuit FPGA et à un rail de base haute intensité, basse tension répondant à des exigences de variation de tension très strictes. De ce fait, les anciens systèmes de gestion de l’alimentation sont moins intéressants du point de vue pratique, car ils ne peuvent respecter l’ensemble des conditions de taille, de poids et de résistance aux rayonnements pour les satellites. Cet article propose une architecture de système d’alimentation au point de charge qui met en lumière en quoi il est pertinent de tenir compte des performances de sensibilité aux rayonnements, et en particulier des effets singuliers de particules isolées (Single-Event Effects, SEE), afin de respecter les exigences de variation de tension en vigueur pour les circuits FPGA.

Aperçu des systèmes d’alimentation en énergie des engins spatiaux

Dans un engin spatial, le système d’alimentation en énergie couvre tous les aspects de la gestion de l’alimentation : génération, stockage, distribution, régulation et contrôle. Il se divise en deux sous-systèmes : le primaire et le secondaire. C’est la combinaison optimale des deux qui permet un fonctionnement efficace. Dans le cadre du processus de conception du sous-système secondaire, l’ingénieur sélectionne des convertisseurs au point de charge adaptés qui peuvent inclure à la fois des régulateurs de commutation CC-CC et des régulateurs à faible tension de déchet. Cet article se concentre sur les régulateurs de commutation, car ils sont plus souvent retenus pour les rails de base des réseaux prédiffusés programmables (FPGA) en raison de leur plus grande efficacité.

Le processus de fabrication des anciens circuits FPGA dédiés aux applications spatiales s’appuyait sur des configurations structurelles plus grandes, dédiées à atténuer les changements d’état logique d’un point mémoire dus à une particule isolée (Single-Event Upset, SEU) en utilisant des méthodes de durcissement telles que la triplication des registres ou encore des cellules mémoire DICE (Dual-Interlocked Storage CElls) [1]. Ce processus présentait au moins un avantage : les capacités de routage parasites plus élevées, par nature, filtraient les aléas transitoires dus à une particule isolée (Single-Event Transients, SET) inhérentes aux environnements radiatifs. La dernière génération de réseaux FPGA, quant à elle, affiche une densité logique supérieure et des interconnexions plus courtes ; par conséquent, les SET peuvent constituer l’effet singulier dominant, dans la mesure où la charge électrique d’un ion dans l’espace est plus susceptible d’affecter les noeuds sensibles.

Sur les satellites modernes, l’unité secondaire de distribution de puissance doit fournir une large variété de tensions basses, précises et sans fluctuations, même en cas d’importantes variations de charge. La Figure 1 présente un exemple de système de distribution de puissance secondaire.

Comme le montre la Figure 1, les modules s’appuient sur des rails de distribution de puissance à 3,3 V ou à 5 V pour générer les tensions d’alimentation nécessaires localement. Ces tensions locales sont produites par des convertisseurs CC-CC compacts et efficaces, intégrés aux modules. La diversité des tensions d’alimentation et des intensités de courant, ainsi que le renforcement des exigences d’efficacité de l’alimentation, entraînent un problème de conception majeur – de sorte que les anciennes approches de conception bien établies se révèlent moins pratiques et que les objectifs sont plus difficiles à atteindre.

De surcroît, comme le montre la Figure 2, réduire la taille des noeuds de traitement a ramené les rails de base à des valeurs inférieures à 1,0 V ; des convertisseurs CCCC sont alors nécessaires pour optimiser les performances de variation basse tension. Parmi ces optimisations, on peut citer à titre d’exemple des références de tension internes basse ultra précises, en réponse aux progrès accomplis sur les noeuds de traitement ; la compensation de pente ajustable afin d’adapter au mieux le convertisseur CC-CC aux applications hautes performances ; ou encore la possibilité de monter en parallèle les convertisseurs afin de fournir une quantité plus importante de courant et d’améliorer la flexibilité et les possibilités de réutilisation du système.

Parallèlement, à l’heure où les satellites sont de plus en plus complexes (pensons aux programmes d’observation terrestres dotés d’antennes réseau à commande de phase utilisant sur plusieurs circuits FPGA), opter pour des convertisseurs CC-CC basés des transistors à effet de champ à structure métal-oxyde-semiconducteur (MOSFET) permet de concevoir des systèmes plus efficaces [2] [3]. Les ingénieurs peuvent alors réduire la taille du générateur photovoltaïque et le poids de la batterie, et ainsi remplir l’un des principaux objectifs de conception des satellites.

Les progrès accomplis sur les noeuds de traitement pour la technologie FPGA, associés à l’augmentation des capacités de traitement, induisent des exigences de variation de tension plus strictes.

Le Tableau 1 établit la liste des changements opérés en matière de tolérance de variation pour les différents circuits FPG, à mesure que les noeuds de traitement ont évolué. Cette évolution a considérablement réduit la marge et renforcé l’impact des SET sur les régulateurs de commutation au point de charge. Une régulation étroite de la tension de base permet de garantir le bon fonctionnement du système ; d’autre part, placer la source d’alimentation à proximité du nouveau circuit FPGA numérique est désormais d’autant plus pertinent pour s’assurer que l’excursion de tension due aux impédances parasites sera adéquate [5].

Vous pouvez concevoir vos propres convertisseurs au point de charge pour répondre précisément aux exigences des systèmes électroniques, afin de les réutiliser comme interface de puissance standard sur différents modules de charge utile. Bien que cette interface de puissance standard se traduise par une réduction considérable des coûts et du temps de conception, elle est d’autant plus difficile à élaborer qu’il est nécessaire de prendre en compte différentes configurations (différentes tensions d’entrée et de sortie, à différents courants de sortie) du convertisseur au point de charge au cours du processus. La conception implique de modifier à la fois les composants de l’étage de puissance et le réseau de compensation. Par conséquent, il importe de sélectionner des convertisseurs au point de charge qui couvrent les plages de tension requises en entrée et en sortie, et qui sont également capables de fournir un courant suffisant en sortie à la charge [8] [9].

Effets des rayonnements sur les convertisseurs de puissance

Outre les exigences électriques strictes applicables aux conditionneurs de puissance moderne, vous devez prendre en compte les effets des rayonnements. Dans certains cas, ces paramètres peuvent ne pas être aussi évidents que les exigences électriques.

Il existe essentiellement deux catégories d’effets des rayonnements : les effets dépendants du temps et les effets aléatoires dans le temps. Les premiers sont appelés « effets de dose » et entraînent un décalage des paramètres des appareils – avec des spécifications excédant les limites indiquées dans la fiche technique. On distingue deux types d’effets de dose : la dose ionisante totale et la dose de neutrons/protons. Étant dépendants du facteur temps, ces effets sont généralement très bien quantifiés et compris. Par conséquent, il est facile d’opter pour un dispositif de puissance pour l’aérospatiale correspondant au profil temporel de la mission.

Quant aux effets aléatoires dans le temps, il s’agit des effets singuliers de particules isolées (SEE). Étant donné leur caractère aléatoire – et, dans certains cas, destructif –, ils sont parfois plus difficiles à comprendre et à intégrer dans un conditionneur de puissance. Il existe deux types d’effets singuliers dus à une particule isolée : les effets destructifs et non destructifs [10].

Parmi les SEE destructifs, on compte les déclenchements parasites du thyristor (Single-Event Latch-up, SEL), les ruptures de l’oxyde de grille d’un transistor (Single-Event Gate Rupture, SEGR) et les destructions thermiques du composant par un courant important (Single-Event Burnout, SEB). Ces deux derniers effets concernent particulièrement les transistors de puissance à effet de champ, tels que ceux utilisés dans l’étage de sortie d’un convertisseur CC-CC. Les SEE destructifs, de par leur nature (tout ou rien), sont donc dans, une certaine mesure, relativement aisés à évaluer. Si le fabriquant réalise ces essais et en consigne correctement les résultats jusqu’à une valeur de transfert linéique d’énergie efficace (LETeff) spécifique, vous serez en mesure de sélectionner un appareil adapté à l’orbite voulue pour la mission.

Les SEE non destructifs incluent les SET, les SEU et les SEFI (Single-Event Functional Interrupts, pertes de fonctionnalité du circuit ou d’un sous-circuit). Typiquement, ils se manifestent par une pointe de tension à la sortie de l’appareil, dont l’amplitude et le comportement dépendent du transfert linéique d’énergie efficace ainsi que des conditions d’essai électriques. Les SEE non destructifs sont donc un peu plus complexes que les SEE destructifs.

Les SET et les SEFI sont généralement observés sur les appareils analogiques, tandis que les SEU sont observés sur les appareils numériques en cas de basculement de bit sur un circuit numérique. La plupart des conditionneurs de puissance pour l’espace étant analogiques, nous nous concentrerons sur les SET et les SEFI. Ces effets doivent être caractérisés en détail afin de s’assurer qu’ils n’affectent pas le bon fonctionnement de la charge et ne risquent pas de l’endommager.

Selon le type de charge, les exigences de variation de tension peuvent être strictes. Comme le montre le Tableau 1, les circuits FPGA haute performance qualifiés pour l’aérospatiale requièrent généralement une précision de variation de ± 4 % sur leur tension de base. Ce pourcentage comprend la variation électrique en courant alternatif et continu, ainsi que les effets du vieillissement et des rayonnement typiques des applications spatiales. Par conséquent, les convertisseurs CC-CC sensibles aux effets des rayonnements peuvent souffrir de variations de la tension de sortie supérieures aux exigences de précision du circuit FPGA, ce qui déclenche une réinitialisation à la mise sous tension du circuit FPGA, une perte de données et la nécessité de reprogrammer le circuit FPGA si la tension de sortie chute (SET négatif). À l’inverse, ce qui est plus grave encore : une augmentation de la tension de sortie (SET positif) est susceptible de contrevenir à la limite maximale absolue de tension nominale du circuit FPGA, et potentiellement d’endommager l’appareil.

Les suramplitudes importantes (> 4%) à la sortie des dispositifs de puissance sont particulièrement problématiques, car elles peuvent provoquer des dommages permanents (contrainte électrique excessive) sur la suite des circuits.

La Figure 3 présente un exemple de SEFI sur le TPS50601-SP, un convertisseur CC-CC pour l’aérospatiale de Texas Instruments. Un SEFI se produit à LETeff = 86 MeV-cm2/mg, avec un délai de récupération d’environ 4 ms. Ici, le risque n’est pas tellement que la tension assignée de la charge soit dépassée, mais plutôt que la charge cesse de fonctionner – ce qui pourrait impacter les performances du système. Au premier abord, il peut sembler préférable d’opter pour un appareil qui ne présente aucun SEFI jusqu’à la valeur LETeff voulue ; cependant, il est essentiel de caractériser ces effets avant d’émettre un tel avis. Les 62 événements superposés sur la Figure 3 illustrent la répétabilité des SEFI.

Après caractérisation aux ions lourds, vous pouvez calculer les taux d’occurrence des événements afin de déterminer si un dispositif donné est adapté à l’application voulue. Le Tableau 2 répertorie les taux d’occurrence des SEFI illustrés dans la Figure 3. Texas Instruments a calculé ces taux pour des satellites en orbite basse autour de la Terre (LEO), tels que la Station spatiale internationale, ou en orbite géosynchrone (GEO). Les résultats indiquent que les SEFI présentés par la Figure 3 se produiraient tous les 700 000 en orbite basse et tous les 210 000 ans en orbite géosynchrone. Après analyse, il s’avère que le TPS50601-SP offre des performances de résistance aux rayonnements fiables quel que soit le type d’orbite. Pour plus d’informations sur les performances du TPS50601-SP en termes de SEE, consultez le rapport sur les SEE complet.

Conclusion

Le nombre de noeuds de traitement dans les technologies à semiconducteurs a considérablement diminué, et les tensions d’alimentation des coeurs numériques sont désormais inférieures à 1 V. En plus d’améliorer la capacité de traitement de ces coeurs numériques, ces évolutions entraînent une augmentation des courants d’alimentation et des exigences strictes en matière de variation sur les convertisseurs de puissance. Ces exigences sont liées aux performances électriques des convertisseurs au point de charge, mais aussi à leurs performances lorsqu’elles sont soumises aux effets des rayonnements. Un convertisseur CC-CC sensible aux rayonnements pourrait affecter gravement les performances d’un système en aval, voire endommager la charge. De ce fait, caractériser correctement les effets singuliers observables sur un convertisseur CC-CC vous aidera à opter pour le convertisseur au point de charge le mieux adapté, en fonction du taux d’occurrence calculé.

Références :

1. Kulis, S. Single Event Effects Mitigation with TMRG Tool (Limitation des effets singuliers grâce à l’outil TMRG). Publié dans le Journal of Instrumentation 12 (janvier 2017) : 1-5.

2. Pérez, Manuel Padial. 2019. Secondary Power Distribution in Satellites (Distribution de puissance secondaire dans les satellites). Blog DOEEET, 8 avril 2019.

3. Space IC. Efficient Secondary DC Power Distribution in Satellites (Distribution de courant continu secondaire efficace dans les satellites). Livre blanc de Space IC, document no V1701, février 2017.

4. Hart, Chris. 2017. Space Power and Point-of-Load Solutions Product Overview (Aperçu des solutions de puissance et de point de charge pour l’aérospatiale). Forum 2017 de Microsemi dédié au secteur aérospatial, aperçu des solutions de puissance et de point de charge pour l’aérospatiale.

5. Bedi, Rajan. 2014. A Comparison of Space-Grade FPGAs, Part 2 (Comparaison des circuits FPGA pour l’aérospatiale, partie 2) EDN, 8 juillet 2014.

6. Microsemi Corp. n.d. Space-Grade Devices (Appareils dédiés à l’aérospatiale). Consulté le 8 avril 2021.

7. Xilinx. n.d. Aerospace and Defense (Aérospatiale et défense). Consulté le 8 avril 2021.

8. Actel. System Management Using a Mixed-Signal FPGA (Gestion de système basée sur un circuit FPGA à signaux mixtes). Libre blanc Actel Corp., 2006.

9. Kaye, Zak et Javier Valle. TI Space-Rated Power Solution for Microsemi RTG4 FPGA (Solution de puissance pour l’aérospatiale de TI dédiée au circuit FPGA RTG4 de Microsemi). Rapport d’application Texas Instruments, document no SLVA857A, juillet 2018.

10. Baumann, Robert et Kirby Kruckmeyer. Radiation Handbook for Electronics (Guide des rayonnements pour les dispositifs électroniques). E-book Texas Instrumen document no SGZY002A, 2020.

https://www.ti.com/

Suivez Electronique Mag sur le Web

 

Newsletter

Inscrivez-vous a la newsletter d'Electronique Mag pour recevoir, régulièrement, des nouvelles du site par courrier électronique.

Email: