1 En 2026, l’intelligence artificielle va quitter nos écrans pour conquérir le monde réel.
Pour ADI, l’intelligence physique constitue la prochaine frontière. Les lois d’échelle qui ont permis aux grands modèles de langage (LLM) et de vision se poursuivront tout au long de l’année, mais s’étendront à des modèles capables d’apprendre à partir de vibrations, de sons, de champs magnétiques et de mouvements (attributs immuables du monde physique). Je prédis que ces modèles de raisonnement physique migreront des datacentres vers la périphérie, l’edge, propulsant un nouveau type d’autonomie fluide capable de penser et d’agir localement en étant sensible à la physique locale sans recourir à des serveurs centralisés. Ces modèles apprendront de manière dynamique à partir de situations originales, exposés à seulement quelques exemples de circonstances originales. Imaginez un robot industriel mobile qui puisse raisonner par lui-même et déterminer ce qu’il doit faire face à un obstacle inattendu. Nous devons nous attendre à une hausse du nombre de « modèles du monde » hybrides qui associent un raisonnement mathématique et physique à une dynamique issue de la fusion des données de capteurs, ainsi que du nombre de systèmes capables non seulement de décrire le monde, mais également d’y participer et, comme l’explique Richard Sutton, d’apprendre de leur propre « expérience ».
2. Le son va devenir l’interface d’IA dominante pour l’électronique grand public.
Le son est sur le point de s’imposer comme un « canal de raisonnement », et nous allons assister de manière spectaculaire à cette métamorphose en 2026. Avec la convergence du son spatial, de la fusion des capteurs et du raisonnement embarqué, les produits d’électronique grand public vont se transformer en compagnons contextuels. Les lunettes de réalité augmentée (RA) et les appareils audio portatifs (« wearables ») tels que les écouteurs et les systèmes audio installés à bord de nos automobiles interpréteront discrètement notre environnement, en déduisant nos intentions, nos émotions et notre présence. Ces avancées technologiques permettront d’améliorer considérablement la réduction du niveau de bruit dans les appareils auditifs, d’augmenter l’autonomie des batteries et de créer de nouveaux formats que nous sommes encore loin d’imaginer. Déjà en vogue au sein de la génération Z, l’expérience intra-auriculaire connectée en permanence deviendra de plus en plus répandue grâce à l’audition « surhumaine » de l’IA contextuelle.
3. L’IA agentique va donner naissance à des modèles physiquement intelligents, entraînés au travers d’environnements de simulation physiquement exacts.
La prochaine évolution de l’IA embarquée sera agentique. Bientôt, les systèmes agentiques ne se contenteront plus de prédire : ils prendront des décisions et agiront de manière autonome dans le monde réel grâce à des interventions physiquement fondées, répétées dans des environnements simulés. Dans ce contexte, nous assisterons en 2026 à l’arrivée à grande échelle des jumeaux numériques qui doteront les grands modèles d’une conscience digne des systèmes physiques. Imaginez des modèles d’IA capables d’apprendre à prédire des forces et non plus des textes, tout en bénéficiant de la sécurité d’un environnement simulé évolutif. Les modèles de fondation physiquement intelligents fusionneront le raisonnement et l’intelligence des capteurs pour orchestrer le fonctionnement de machines, des simulations et des données. Aujourd’hui, de nombreuses usines disposent de la technologie nécessaire pour exécuter des tâches de maintenance prédictive, mais on peut imaginer un avenir où un agent présent dans un atelier agira sur la base de ces prévisions — par exemple pour transférer de manière autonome la chaîne de production vers une machine plus performante, régler une machine en difficulté à 70 % de sa capacité afin d’en prolonger la durée de vie ou coordonner son activité avec les agents de la chaîne d’approvisionnement pour optimiser des stocks — le tout sans intervention humaine.
4. L’IA va connaître un tournant avec l’émergence de la micro-intelligence.
En 2026, une nouvelle catégorie de modèles récursifs compacts va voir le jour : des systèmes de faibles dimensions dotés d’une remarquable profondeur de raisonnement dans un domaine restreint, mais capables de fonctionner en périphérie du réseau. Imaginez des micro-intelligences plutôt que de simples modèles compacts. À la fois fluides, adaptables et conçus pour effectuer une tâche spécifique, mais toujours capables d’abstraction et de réflexion, ils occuperont une place intermédiaire entre l’IA programmée rigide que l’on voit aujourd’hui en périphérie et les modèles de fondation tentaculaires comme GPT-5. Ils alimenteront le raisonnement spécialisé dans les circuits intégrés, les capteurs et les plus petits systèmes, agissant en tant qu’orchestrateur des agents spécialisés qui émergent actuellement. Ces nouveaux types de modèles naîtront de la course à la création de systèmes intelligents fluides, encouragée par l’ARC Prize et d’autres initiatives similaires. Je prédis l’émergence de nouveaux types d’évaluations d’IA conçues pour mesurer et encourager une nouvelle forme d’intelligence technique : des micro-intelligences multi-agents capables de collaborer pour résoudre des problèmes techniques complexes, passant du monde des défis mathématiques abstraits (les Olympiades des mathématiques, par exemple) à des systèmes de résolution de problèmes concrets.
1. L’IA décentralisée fera son apparition dans la robotique humanoïde de nouvelle génération avant la fin de l’année 2026.
D’ici fin 2026, les architectures d’IA décentralisées qui fusionnent détection, calcul neuromorphique et calcul en mémoire passeront des programmes pilotes à un déploiement commercial précoce. Des systèmes robotiques humanoïdes vont se rapprocher un peu plus des systèmes biologiques où les circuits locaux des organes sensoriels et des voies spinales gèrent les réflexes et l’équilibre, autorisant des mouvements plus fluides et plus adaptatifs moyennant une consommation d’énergie considérablement réduite pour permettre au cerveau central « de penser et de planifier ».
Ces avancées technologiques commenceront par des capteurs intelligents qui embarquent directement dans le capteur de nouvelles architectures de calcul d’IA (architectures neuromorphiques et de calcul en mémoire). La combinaison de l’IA décentralisée et de ces nouvelles architectures de calcul d’IA réduira considérablement la latence et la consommation d’énergie, permettant à l’IA d’être toujours active en périphérie et aux processeurs les plus puissants de se concentrer sur le raisonnement, la planification et l’apprentissage de haut niveau, et non plus sur la microgestion de boucles de contrôle sensorimotrices continues. En rendant possible un traitement d’IA en temps réel et à faible latence en périphérie, les robots deviendront plus efficaces, plus réactifs et capables de compétences sensorimotrices quasi biologiques. Cette évolution provoquera un changement radical dans leur capacité à interagir avec des environnements complexes et dynamiques en faisant preuve d’une coordination fluide et fiable, ouvrant la voie à une robotique humanoïde pratique et omniprésente.
2. En 2026, nous allons assister à l’essor du calcul d’IA analogique.
Historiquement écarté en raison de ses limites d’évolutivité et de précision, le calcul analogique va refaire surface en 2026 lorsque les architectures numériques seront confrontées à des goulots d’étranglement d’énergie, de latence et de mémoire, sans solution à l’horizon. Cette situation est particulièrement critique dans les environnements de périphérie où la réactivité en temps réel et l’efficacité énergétique sont des critères décisifs. Le calcul d’IA analogique utilise la physique du substrat de détection et de calcul pour procéder à des calculs, transformant directement l’énergie en inférence d’IA. Cette approche diffère du calcul d’IA effectuée par des processeurs numériques conventionnels qui séparent les tâches de détection et de calcul. L’IA analogique fusionne ces couches dans un cadre unifié où l’intelligence commence au niveau du capteur proprement dit. D’ici la fin de l’année 2026, nous assisterons aux premiers déploiements et à l’adoption de cette technologie, notamment dans les domaines de la robotique, des wearables et des applications autonomes où l’IA analogique autorise une réactivité en temps réel, des interactions plus fluides, une autonomie de batterie allongée et un comportement plus naturel des appareils qu’elle alimente.